Personne ne sait ce à quoi peut ressembler une famille d'Écosse. À vrai dire j’aimerais bien ne pas avoir la réponse. Malheureusement, ce journal est la preuve même que ma vie n’est pas des plus roses bonbon. Et n’allez pas croire que je suis le genre de fille à se plaindre de ce qu’elle doit endurer, mais ce que je vais partager est assez douloureux.

Cher journal,
Par où commencer? Tellement de détails me viennent à l’esprit, mais je sais que jamais mon récit ne sera complet. Je crois cependant qu’il est mieux de parler un peu de mes années d’adolescence en Écosse. Comparativement aux autres jeunes filles de mon âge, je n'ai jamais connu la joie des classes. Ma mère, Irina,  préférait m’enseigner à la maison, à la place que j’aille payer une vraie fortune pour des cours. Elle me disait souvent que l’école n’apprenait rien de plus et qu’elle pourrait faire beaucoup mieux. Je ne me plaignais pas, même j’aurais toujours voulu me retrouver dans une classe, avec des élèves et des profs. Au lieu de cela, je devais écouter ma mère rêvassé sur l’astrologie et l’art.

Mes « sweet sixteen » ne purent pas vraiment être qualifiés de la sorte. Irina me fit connaître sa vraie profession; celle d’escorte. Et les hommes, en me voyant entrer dans le bar, n’arrêtaient pas de me regarder. Ma mère souriait, radotant que j’aurais du talent, qu’il ne fallait qu’un peu de pratique. Je ne compris pas tout de suite, mais lorsque je la suivis dans une chambre, avec un homme présent sur le lit, mon cœur arrêta de battre pendant une seconde. En refermant la porte derrière moi, Irina me pousse vers l’inconnu et me susurre à l’oreille : « Voyons donc, sois plus à l’aise. Il ne va pas te manger. »

Il ne me suffit que d’un an avant d’être considérée comme une des meilleures escortes. Et cela me valut d’être transportée jusqu’aux États-Unis, comme divertissement pour des hommes d’affaires. Toutefois, mon but était tout autre que de servir de jouet pour un avare. Je voyais ce voyage comme une opportunité de m’échapper. Irina ne m’avait jamais aimée, je n’étais qu’un moyen d’obtenir plus d’argent. Je n’avais donc rien à perdre. Donc, le soir-même de notre arrivée dans la ville portuaire d'Oakland, en Californie, je pris le peu de possessions que j’avais en main et m’enfuis, dans le froid mordant d’une nuit d’octobre.

Pendant quelques jours, la rue me servit d’abri. Je passais par des marchés extérieurs et volait des fruits, comme n’importe quelle jeune femme âgée de 18 ans (comprenez le sarcasme). Je vivais vraiment au jour le jour, jusqu’à ce que je tombe sur une librairie. J’ai toujours adoré la lecture, même si je ne savais pas aussi bien lire que la plupart des jeunes femmes de mon âge. Je regardais donc la vitrine, mes yeux se perdant sur les nombreux titres. Puis un homme, surpris par ma curiosité, posa sa main sur mon épaule. Je sursautais, le sexe masculin n’étant pour moi qu’un moyen d’obtenir de l’argent. Mais cet inconnu …  il était si différent des autres. Son regard … je ne sais pas comment le décrire sinon qu'il n'était pas sournois. Il me prit sous son aile, sans même que je ne lui demande de l’aide, et me servis de père pendant les années à venir.

Moi qui avait de la difficulté à comprendre les expressions américaines, je me surpris à les utiliser, peu à peu, avec le temps. Et sans accent particulier en prime! En plus de la richesse d’une nouvelle langue, mon sauveur, Dorian, m’enseigna tout ce qu’il savait sur le monde du surnaturel. Il était ce que plusieurs appellent « chasseur » et m’avoua qu’il m’avait suivi pendant plusieurs jours, remarquant ma détermination à survivre même dans la misère de la rue. Pour lui, j’étais celle qui prendrait bientôt ses responsabilités. Je deviendrais à mon tour « chasseuse ». Bien que la peur m’envahisse parfois, je l’entendais souvent me dire combien de vies il avait sauvé, de la main injuste de créatures. Je le vois encore aujourd’hui comme un héros.

Puis, il y eut cette fameuse nuit. Alors qu'on mangeait chinois en écoutant un bon vieux films de comédie, Dorian reçu un appel. Je ne sait pas encore qui c'était, à l'autre bout du fil, mais voyant l'inquiétude sur le visage de Dorian, la situation était grave. Après plusieurs minutes passées au téléphone et le nez dans les livres, il mit fin à la conversation et se dirigea vers moi. Il y avait quelque chose qui clochait; il semblait tout à coup porter le poids du monde entier. « C'était un de mes collègues de travail ». Son ton était froid, monotone. « Il m'a dit qu'il y a une éclosion d'évènements surnaturels dans une petite ville du nom de Beacon Hills ». Il s'assied près de moi, me regarda droit dans les yeux, et sourit un tantinet. « Je ne voulais pas qu'on se jette à la mêlée tout de suite, mais on dirait que tu devras faire don de beaucoup de courage, Charlie. Ton entraînement fini ici et maintenant. Tu deviens officiellement ma collègue de travail. » Ces mots, quoique plaisants, me remplirent de peur; c'était maintenant que commençait l'aventure. C'est ainsi qu'on arrêta la plaisanterie, qu'on remballa tout, et qu'on prit la route.

Nous voilà à Beacon Hills depuis deux jours. Grâce aux nombreux contacts de Dorian (dont j'aimerais bien avoir les numéros), il se hissa une place près du cœur professoral en tant que bibliothécaire, et il en profita pour me faire recruter par la police et ainsi garder les yeux et les oreilles alertes. Qui eut cru que moi, Charlotte Jade Pond, ex-escorte et maintenant chasseuse, deviendrait une policière (d'accord, je sais que ce sont de faux papiers, mais quand même …)?Pour la première fois, je me sens prête à vivre. Je ne sais pas comment l’expliquer, mais je vois un but à atteindre et, même sans une vraisemblable preuve de survie, je n’ai pas peur. Après tout, je suis une femme qui a perdu un peu de sa féminité, mais jamais de sa détermination. Je dois maintenant écrire ma propre histoire, et sauver, à mon tour, des vies. Me voilà qui traverse les portes  du commissariat et ça me donne des frissons. Je sens que cette ville sera mon nouveau point d'ancrage. Gare à vos fesses, there’s a new girl in town!

Bienvenu parmi nous!
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